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Publié par Régine BIANGONGA

IMGP0718

L'année 2011 -tout du moins, ses quelques 6 premiers mois- aura été riche en événements et en tsunami.

C'est d'un tsunami des consciences -françaises mais aussi occidentales voire mondiales- dont je souhaite parler dans cet article.

Soit la médiatisation d'une présomption d'agression sexuelle  imputée à une personnalité influente du macrocosme économique et financier

et la violence qu'elle a induit dans sa réalité, dans la symbolique et l'inconscient collectif provoquant un déferlement de propos, de point de vue de tout un chacun. 

 

Révélant ce que cet événement avait de traumatisant, de choquant voire de quasi-irréel. Du moins quelque chose qu'on ne voulait pas voir, quelque chose de dénié, d'enfoui au plus profond de notre inconscient culturel et qui nous explosait làen pleine  figure

 

Plusieurs sons de cloche -assez fort pour faire mal aux oreilles et donner envie de se les boucher ou donner envie d'agir pour faire entendre un autre son de cloche-, plusieurs manières de faire avec sont apparues allant du déni à l'obligation d’ouvrir les yeux, de voir et d'entendre ce qui était dit en sourdine, à mots couverts ou au contraire sans vergogne.

 

Après une semaine de ce tohubohu, des femmes ont publié une tribune dans le quotidien Le Monde daté du 25 mai 2011 : «  Depuis le début de l'affaire DSK, "nous sommes abasourdies par le déferlement quotidien de propos misogynes tenus par des personnalités publiques", dénoncent les signataires d'une pétition initiée par les associations Osez le féminisme, La Barbe et Paroles de femmes. »

Ci-dessous, le texte intégral de leur article, appel à pétition et manifestation : 

      

Sexisme : ils se lâchent, les femmes trinquent

Depuis une semaine, nous sommes abasourdies par le déferlement quotidien de propos misogynes tenus par des personnalités publiques, largement relayés sur nos écrans, postes de radios, lieux de travail comme sur les réseaux sociaux. Nous avons eu droit à un florilège de remarques sexistes, du « il n’y a pas mort d’homme » au « troussage de domestique » en passant par « c’est un tort d’aimer les femmes ? » ou les commentaires établissant un lien entre l’apparence physique des femmes, leur tenue vestimentaire et le comportement des hommes qu’elles croisent.

 

Nous sommes en colère, révoltées et révoltés, indignées et indignés.

 

Nous ne savons pas ce qui s’est passé à New York samedi dernier mais nous savons ce qui se passe en France depuis une semaine. Nous assistons à une fulgurante remontée à la surface de réflexes sexistes et réactionnaires, si prompts à surgir chez une partie des élites françaises.

 

Ces propos illustrent l’impunité qui règne dans notre pays quant à l’expression publique d’un sexisme décomplexé. Autant de tolérance ne serait acceptée dans nul autre cas de discrimination.

 

Ces propos tendent à minimiser la gravité du viol, tendent à en faire une situation aux frontières floues, plus ou moins acceptable, une sorte de dérapage. Ils envoient un message simple aux victimes présentes et futures : « ne portez pas plainte ». Nous le rappelons : le viol et la tentative de viol sont des crimes.

 

Ces propos prouvent à quel point la réalité des violences faites aux femmes est méconnue. De la part d’élites qui prétendent diriger notre société, c’est particulièrement inquiétant. 75 000 femmes sont violées chaque année dans notre pays, de toutes catégories sociales, de tous âges. Leur seul point commun est d’être des femmes. Le seul point commun des agresseurs, c’est d’être des hommes.

 

Enfin, ces propos font apparaître une confusion intolérable entre liberté sexuelle et violence faite aux femmes. Les actes violents, viol, tentative de viol, harcèlement sont la marque d’une volonté de domination des hommes sur le corps des femmes. Faire ce parallèle est dangereux et malhonnête : ils ouvrent la voie aux partisans d’un retour à l’ordre moral qui freine l’émancipation des femmes et des hommes.

 

Les personnalités publiques qui véhiculent des stéréotypes qu’on croyait d’un autre siècle insultent toutes les femmes ainsi que toutes celles et ceux qui tiennent à la dignité humaine et luttent au quotidien pour faire avancer l’égalité femmes – hommes.

http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/05/21/sexisme-ils-se-lachent-les-femmes-trinquent_1525179_3232.html

 

Cet appel contre le sexisme est initié par les associations Osez le féminisme, La Barbe et Paroles de femmes. Il regroupe une dizaine d'associations et plus de 1 000 signataires dont : Audrey Pulvar, Clémentine Autain, Florence Montreynaud, Annick Coupé, Annie Ernaux, Agnès Bihl, Marie-Françoise Colombani, Florence Foresti, Patric Jean (réalisateur), Julien Bayou (membre du collectif Jeudi Noir) ou encore Geneviève Fraisse.

 

Texte wordART 1

 

Pourquoi en SOMMES-NOUS-LA ?

Françoise Héritier (née en 1933), anthropologue, développe sa pensée sur l'organisation du rapport hiérarchique entre les sexes et son origine.

Plusieurs de ses ouvrages récents et notamment Masculin-Féminin I. La pensée de la différence, Paris, Éditions Odile Jacob, 1996 ; rééd. 2002 ont fait date dans l’explication du pourquoi de cette domination masculine que l’on observe encore tous les jours malgré les affichages d’actions en faveur de l’égalité hommes-femmes.

 Ce rapport hiérarchique entre les sexes se perpétue depuis, semble-t-il, la nuit des temps.

 Ci-dessous, un extrait d’une interview de Françoise Héritier réalisée par le journal Le Point en 2003  (cf http://1libertaire.free.fr/FHeritier05.html) fournissant une compréhension de cette hiérarchisation des rapports entre les sexes et genres humains.

Cette explication s’établit  à l’aune de nos  différences  sexuées qui donnent un avantage intangible à la femme, capable de donner la vie à des nouveaux êtres des deux sexes. L’homme soumet  la femme afin de s’approprier cette capacité de la femme dont il est nécessairement tributaire.

« LE POINT : Au début donc, le masculin et le féminin. Puis, très vite, le masculin qui domine partout, toujours. Comment la hiérarchie s'est-elle insinuée dans la différence des sexes ?

FRANÇOISE HÉRITIER : Les observations, faites aux aubes de l'humanité, sont concrètes. Le sang est chaud et signifie la vie. L'homme ne le perd qu'accidentellement ou volontairement, en tout cas de manière active. Il est considéré comme constamment chaud. La femme perd son sang régulièrement, ce qui lui donne un caractère froid et humide, et elle le perd sans pouvoir l'empêcher, ce qui lui confère un caractère passif. Or, dans la plupart des sociétés, l'actif est masculin et supérieur au passif féminin. Le fait que ces catégorisations binaires soient hiérarchisées, au-delà de la simple différence, signifie que la hiérarchie provient d'une autre raison que ces différences sexuées.  

En effet, parmi toutes les observations faites par nos ancêtres, il en est une particulièrement inexplicable, injuste, exorbitante : les femmes font leurs semblables, des filles comme elles, les hommes, non. Ils ont besoin des femmes pour faire leurs fils. Mais cette capacité de produire du différent, des corps masculins, s’est retournée contre les femmes. Elles sont devenues une ressource nécessaire à se partager. Les hommes doivent socialement se les approprier sur la longue durée pour avoir des fils. En outre, des systèmes de pensée expliquent le mystère de la procréation en plaçant le germe exclusivement dans la semence masculine. La naissance de filles est un échec du masculin, provisoire mais nécessaire. Dans cette double appropriation, en esprit et en corps, naît la hiérarchie. Elle s’inscrit déjà dans les catégories binaires qui caractérisent les deux sexes, car elles s’accompagnent nécessairement de dénigrement, de dépossession de la liberté et de confinement dans la fonction reproductive. » 

 

COMMENT PARVENIR A DEPASSER CETTE HIERARCHISATION ?

 

Ce que l’on nomme « l’affaire DSK » nous montre combien cette hiérarchisation entre les sexes est encore bien prégnante dans nos sociétés et fait en quelque sorte partie d’un inconscient collectif malgré les voix qui s’élèvent ici ou là pour faire entendre ou émettre d’autres façons de penser, d’appréhender ces différences et de construire un vivre ensemble plus égalitaire.

Cette « affaire » montre qu’un fait de la sphère privée d’un individu –que l’on peut rattacher à une approche psychologique- et également un fait social, qui touche aux droits des individus, donc un fait juridique et politique. Il rejoint en cela, l’analyse d’Edgar Morin concernant la complexité - Edgar Morin : La méthode 6 - Ethique
Seuil, 2004 - intrinsèquement liée au vivre en société. Celle-ci ne peut se comprendre hors de cette complexité : tout est imbriqué et lié en un ensemble complexe.

In http://nouvellerevuemoderne.free.fr/edgarmorin_ethique.htm#1 « Morin fait sienne l'ambition de penser le réel dans sa totalité et dans son évolution, sans renoncer à la perspective de transformer le monde[ ] . La pensée complexe intègre les notions de crise, de désordre et d'organisation, d'entropie, de hasard et d'incertitude… Cette "pensée qui relie" rend la complexité du réel moins intimidante. Elle est aussi un remarquable outil pour l'intelligence en action. Elle peut éclairer l'action collective, dans le domaine politique, mais aussi la pensée et la vie quotidienne de chacun. Si la fonction de la philosophie est de nous aider à vivre et à percer un tant soit peu le mystère du monde, celle d'Edgar Morin joue pleinement ce rôle. Loin de toute vérité révélée, et dans une approche matérialiste qui intègre et renouvelle les meilleures traditions de l'humanisme, il nous propose les éléments d'un "savoir-penser", d'un "savoir-comprendre", mais aussi d'un "savoir-vivre"… »

 

 

 Texte wordART2

 

Comprendre le monde qui nous entoure, c’est pouvoir agir –à sa mesure- pour son changement et son amélioration pour tout un chacun, en tenant compte de sa complexité.

Les commentaires, les verbiages, les mots, les interprétations qui ont suivi cette « affaire » sont peut-être,   une métaphore sociétale   –en tout cas,  j’y vois nombre de similitudes- de la courbe des étapes individuelles face au deuil établie par Elisabeth Kübler-Ross (1926, 2004) psychiatre et psycholgue américaine

 http://fr.wikipedia.org/wiki/Elisabeth_K%C3%BCbler-Ross et repris dans bien d’autres domaines tels que le travail, la psychogénéalogie

 (cf http://www.psychogenealogie.name/fr/etapesdeuil.htm et Anne ANCELIN SCHUTZENBERGER ) d’où j’ai tiré le graphique et les commentaires de la courbe des étapes du deuil ci-contre :  

Courbe des étapes du deuil (inspirée des travaux  d'Elisabeth  Kübler-Ross)

Graphique amélioré par Evelyne Bissone Jeufroy

 

La Descente

Le deuil commence par le choc de la perte.

 La Perte : Si le moment de la perte n’est pas perçu le travail de deuil ne peut pas s’engager

Le Déni :  Cette étape est d’autant plus fortement ressentie que l’attachement est rompu de façon soudaine, inattendue (« c’est n’est pas possible, pas moi, pas maintenant »)

La Colère : 

Va du  ronchonnement accusateur à la fureur (« ce n’est pas juste », « ils n’avaient pas le droit »)

La Peur Peur pour soi ou peur pour les autres, peur ponctuelle ou angoisse globale. Le monde apparaît comme une source de dangers insurmontables. (« qu’est-ce que je vais devenir, comment vais-je faire face » Ici apparaît le problème de mobilité

 

 

  Courbe des étapes du deuil

 

La Tristesse :

 

Etape décisive et difficile

 pour affronter la réalité

car on prend conscience

 que ce qui a été fait est fait

 et qu’il n’y a plus rien à faire

 

…………Et …………

 

La Remontée  : 

On sort de l’impasse, l’espoir renaît 

L’Acceptation : « C’est dur mais c’est ainsi et je vais continuer à vivre le mieux possible. » Dans cette démarche d’acceptation, c’est la personne qui vit le deuil qui passe au premier plan et non plus l’objet du deuil

Le Pardon : Pardon à soi-même, renoncer à l’illusion de la toute puissance, ne plus se laisser envahir par la culpabilité. Ensuite vient le pardon aux auteurs de la perte

Quête du sens  : ou le  cadeau caché : « grâce au deuil j’ai pu... » Il s’agit de reconnaître et d’accepter que le deuil a permis de faire des choses non envisageables dans l’ancienne situation.

La Sérénité  : (accès au nouvel attachement) : La personne a fait la paix avec ce moment de vie sans excès d’émotion. Elle vit dans l’ici et maintenant et ce qui lui arrive aujourd’hui a plus de retentissement que le passé. Si un nouveau projet se dessine, la personne est capable d’y adhérer.

 

En QUOI ces ETAPES PEUVENT S’APPLIQUER A CE TSUNAMI RECENT DES CONSCIENCES ?

      La première étape de choc et sidération correspond en tout point à ce qui a été retransmis par les médias et même vécu personnellement par tout un chacun,

      puis la phase de DENI qui correspond à la thèse du complot ou plus récemment à celle consistant à dénigrer la victime, occultant les faits pourtant toujours présents en tant que chefs d’inculpation vis-à-vis de l’accusé.

      Les autres étapes descendantes : COLERE, PEUR-DEPRESSION voire TRISTESSE peuvent aussi être perçues et trouvées dans l’analyse des champs lexicaux utilisés par les journalistes, les amis de DSK, les citoyens et citoyennes s’exprimant sur le sujet, etc.

      Quant aux étapes de remontée « On sort de l’impasse, l’espoir renaît » : l’ACCEPTATION, le PARDON, la QUETE du SENS et la SERENITE, si elles s’inscrivent dans cette affaire, c’est pour l’instant, en filigramme.

 

Texte wordART3

 

* Ceci implique l’établissement de nouvelles relations entre hommes et femmes marquées du sceau de la compréhension, du respect, de la complémentarité entre hommes et femmes, de la possibilité pour tout un chacun de s’émanciper, de pouvoir se projeter dans un avenir où chacun et chacune a une place à part entière : un avenir à inventer et construire tous ensemble. Un projet éminemment politique (de polis : cité en grec).

 

 

 

 

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